Dans quel état d’esprit étiez-vous lorsque vous avez écrit ce livre?
Un état d’esprit multiple, j’ai envie de dire, vue qu’il y a plusieurs mouvements dans ce livre. Ce qui l’explique est ce questionnement : « comment est-ce que l’on peut aimer la Terre si on ne s’aime pas ? » Un état d’esprit très intime. J’ai passé plusieurs moments dans des espaces profonds de moi-même. C’est vraiment un processus car ce livre s’est construit sur quatre ans.
Avez-vous écrit ce livre afin de surmonter vos conflits intérieurs et vos pensées contradictoires ?
L’envie était de partager ma joie sur ce chemin de retour à soi, la joie que j’ai à un moment donné lorsque je retrouve cet élan de vie en moi, lorsque je me mets à dépasser ce frein, toutes ces douleurs qu’on peut vivre, ce conflit en interne et le moment où je me suis mise à sentir les solutions possibles et que je me suis dis « waou, elle a tellement de goût, cette vie », que j’ai envie de partager cela. Donc ce livre est là pour entraîner les lecteurs dans cette même aventure.
Est-ce que « l’autre terre », titre de votre livre, s’apparente à notre vie intérieure ?
Oui c’est cette terre intérieure, c’est cet espace de magie qui rentre en résonance avec le vivant, c’est ce monde que nous portons, un lien invisible et en même temps un espace.
Nous sommes dans la nature et la nature est en nous, par le fait qu’on la respire.
Nous sommes dans la nature et la nature est en nous, par le fait qu’on la respire.
Pensez-vous que chaque lecteur puisse avoir sa propre interprétation de votre livre ?
Finalement, « l’autre terre » propose deux mouvements. Ce retour vers soi, et ensuite cette connection à la nature. Le livre est construit en deux mouvements qui proposent aussi tout ce cheminement vers soi. D’abord la gestation, l’accouchement, cette venue au monde, et puis ce décalage que l’on ressent tous entre la vie qui est construite, et ce que nous sommes vraiment. Comment s’adapter, et puis après il y a la souffrance…
Écrire ce livre a-t-il été salutaire dans votre parcours spirituel et vos rencontres ? Et d’où est venue votre force ?
Oui ce livre me guérit. M’a guérie. Continue de me bousculer, de m’enseigner chaque fois que je l’ouvre. C’est un infini de vibrations et de possibles qui amène en moi du vivant. Ce que j’expérimente c’est que la vie est d’une puissance immense. Le mouvement de vie est comme celui de la plante qui pousse à travers un mur de béton et ça je le ressens et c’est ça qui m’a portée malgré ce que j’ai vécu comme situations difficiles. Dans tout, il y a un enseignement et quelque chose d’intéressant. En tout cas je peux en faire quelque chose d’intéressant. Je sors de cette division entre le positif et le négatif. Les souffrances que j’ai vécues ont une certaine logique, à un certain niveau.
La chronologie de votre livre est-elle celle de votre vie ?
Non, pas forcément. J’ai une manière d’écrire un peu particulière. Il y a plusieurs temps en fait. De l’expérience dans le ventre de ma mère, qui est quelque chose que j’ai contacté en thérapie, ensuite j’ai créé cette chronologie de la gestation à reprendre sa souveraineté. En fait ce sont des mouvements qui ne sont pas forcément dans l’ordre mais par thématiques. Tout m’inspire à partir du moment où je commence à écrire : une rencontre, une émission, un souvenir, une séance dans mon propre métier. Cette notion de synchronicité est géniale.
Comment rebondir lorsqu’on a la sensation de toucher le fond ? Comment définir ceux que vous nommez les torrents guérisseurs d’âme ?
Je mélange le réel et l’imaginaire. Il n’y a pas vraiment de frontière entre les deux. Comment j’ai conscience mais parfois quand on a touché le fond, on n’a plus cette lucidité et on a juste envie de rester au fond. Rebondir, c’est se laisser toucher, c’est avoir juste un instant, une fraction de seconde où quelque chose va nous toucher et nous sortir de cet état, ce qui fait penser à l’envie de suicide. Ce qui m’a aidée, c’est que mon esprit soit distrait quelques instants. Pour rebondir, on peut revenir à ce contact avec la nature, s’asseoir… La conscience de la nature peut aider. Avoir conscience peut bloquer. L’idée est d’aller dans la nature et la laisser faire, sans intention.
À bien y réfléchir, votre livre n’est-il pas un appel à être optimiste malgré tout ? Il rappelle Théodore Monod qui écrit à un âge très avancé : « Mort, désespoir, ennui, sont des mots inacceptables, il faut croire quand même, espérer quand même, aimer quand même ».
Ça me touche car plus j’avance et plus je constate cette diversité de la vie et du vivant entre le fragile, la mort, la joie, la douleur, la peur, c’est un tel mélange et aimer c’est, malgré cela, avec ça, la vie est ce qu’elle est. Le fait que moi-même je plonge en me mettant complètement à nu, c’est aussi pour aider la personne qui me lit, à oser aussi plonger au plus profond d’elle et mettre la lumière sur des espaces que l’on cache et dont on a honte dans cette société de la performance. On perd cette conscience de notre humanité.
Quel sera le prochain chapitre de votre vie?
Là je suis sur les thématiques de l’amour et du toucher étant donné que je suis masseuse, (NDLR : également thérapeute accompagnatrice par la voix, artiste peintre et musicienne) depuis plusieurs années. Je les aborde comme des thérapies et je verrai où ça peut nous mener.
Le visible et l’invisible à travers le toucher, la conscience corporelle qui associe tellement d’éléments. Par le toucher, on peut toucher notre histoire, agir sur cette dernière, contacter notre élan vital. Rejoindre cette force de vie en soi.
Le visible et l’invisible à travers le toucher, la conscience corporelle qui associe tellement d’éléments. Par le toucher, on peut toucher notre histoire, agir sur cette dernière, contacter notre élan vital. Rejoindre cette force de vie en soi.
Avez-vous un autre projet littéraire, invitation à la reflexion meditative en tête ?
La thématique du toucher au niveau de l’écriture et je verrai aussi ce qui va émerger, là, c est déjà mon septième ouvrage et je dois plutôt me freiner…
« L’autre Terre », pour conclure, comment le définiriez-Vous ? Un ouvrage qui permet de trouver son chemin de vie ?
Je tiens beaucoup à la liberté et à la créativité de la personne qui a le livre entre les mains. Pour moi il n’y a pas vraiment de guide au sens où chaque chemin est personnel et à chacun de créer son propre guide. Ce livre est là pour inspirer, stimuler et encourager à aller vers la nature. Plus je m’aime et plus j’aime la nature. La nature m’aide à m’aimer. A travers la nature, il y a l’autre.
Vos origines africaines ont-elles présidé à votre intérêt pour la nature et votre aptitude au bonheur, ou est-ce venu à l’âge adulte après votre départ du foyer familial ?
Je dirais que c’est plutôt venu à l’âge adulte. Mon père est philosophe, anthropologue et écrivain. J’ai donc baigné dans cet environnement littéraire sans m’y intéresser plus que ça. Mais ça m’a portée. Au niveau de mes racines et de mon environnement, mes parents ont quitté mon pays d’origine et j’ai plutôt vécu en vase clos, avec une enfance durant laquelle j’étais incomprise, ma sensibilité, c’était plus une enfance à me défendre, à vivre la solitude comme une errance et à 24 ans quand je me suis retrouvée en Europe, il y a eu une coupure, ce recul, ça m’a permis de comprendre que je n’arrivais pas à aller vers la vie, et entamer cette réflexion : que se passe-t-il en moi ? D’où je viens ? Je n’avais pas le temps d’avoir cette relation à la nature étant enfant, car il y avait d’autres préoccupations. La Suisse, avec les saisons, je pense que j’ai été touchée par cela en arrivant. J’ai commencé à ouvrir les yeux autrement. Le contexte fait beaucoup.
Propos recueillis par LUCILE GELEBART.
« L’autre Terre » Méditations Rituels Connexion au vivant, par Marguerite Laleyé.
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Propos recueillis par LUCILE GELEBART.
« L’autre Terre » Méditations Rituels Connexion au vivant, par Marguerite Laleyé.
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