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Move-On Magazine

« La buvette, le tracteur et le curé » La Forge. Faverges le 6 décembre 2019


Entretien avec Serge Papagalli, auteur, acteur respirant la bonne humeur


| Publié le Lundi 2 Décembre 2019 |

Serge, nous parlions de votre nom.
Papagalli veut effectivement dire « perroquets » en Italien. Je peux donc dire les textes des autres mais mon intérêt va surtout à l’écriture de pièces. Je suis un artisan qui écrit sa 70° pièce en ce moment. J’ai joué Molière, Brecht… mais les gens semblent prendre plaisir à venir voir jouer ce que j’ai écrit, alors je continue.

J’ai envie de dire des choses un peu dans le genre du cinéma italien des années 60/70, c’est-à-dire d’écrire des choses drôles sur une réalité dramatique. Il n’y a pas d’humour qui vaille s’il n’a pas comme fondation un peu de tragédie. Même si j’ai joué Shakespeare, Molière, Feydeau… je reste fondamentalement un artisan.

A votre 70° pièce, vous parvenez toujours à vous surprendre ?
J’ai envie, métaphoriquement, de goûter la prochaine bouteille de vin. J’écris en ce moment une parodie du monde actuel sous la forme d’un western, je trouve toujours cette envie de faire quelque chose de nouveau ou de différent, même lorsque ça s’inscrit dans la continuité en ce qui concerne le spectacle qu’on va jouer à Faverges. C’est une saga commencée il y a 25 ans, que je nourris de choses nouvelles.
Pour revenir à votre question, il faut effectivement se surprendre un peu pour écrire, je suis tout de même mon premier spectateur et il est nécessaire que je m’amuse en écrivant.

C’est une saine libido. Vous avez utilisé le mot « envie » et vos personnages s’appellent l’un Aimé, et l’autre Désiré.
C’est très marrant, je n’avais jamais pensé à ça ! J’aime aussi beaucoup le petit monde paysan, les gens qui ont nourri la France dans l’après-guerre. J’ai une tendresse particulière pour ces petits paysans qu’évoquent ces prénoms, qui faisaient du bio avant que le mot existe.
Toute cette saga parle de la survie du monde paysan qui est en grande souffrance actuellement.

Arrive dans cette saga un nouveau personnage, un curé qui est ici ou là présenté comme strict, rigide, il n’est pas raide au moins ?
Je ne pense pas qu’il puisse être raide avec ce qu’il va vivre. Nous n’abordons pas cet aspect un peu trop chaud. Faire de l’humour là-dessus est un peu compliqué même si je suis agnostique et si je respecte tous les médicaments dont les gens ont besoin pour vivre. Nous vivons dans un pays laïc et il est heureusement possible de traiter certains thèmes avec humour, un peu à la manière de Don Camillo et Peppone.

J’ai voulu confronter le monde paysan laïc que je raconte à un jeune curé traditionaliste qui vient du 5° arrondissement de Lyon. Confronter le bon sens paysan laïco rural incarné en particulier par Désiré, ce neveu simplet/philosophe élevé comme un fils parce que ses parents ont été écrasés par un tracteur à la religion.

A 45 ans Désiré parle comme un enfant et pose beaucoup de questions que nous devrions poser aux prêtres « Qui sont les parents du Bon Dieu ? Quand Dieu va-t-il mourir ? S’il ne meurt pas, il est très vieux. Quand Dieu va mourir, Jésus va hériter de tout ?... »
Ce sont des questions normales que tout le monde devrait poser. Je suis agnostique et j’ai la certitude de mes doutes. Je préfère le doute à la certitude.

Les « crétins des Alpes » ont été considérés comme une fierté par les Savoyards à une époque.
C’est comme chez les Indiens d’Amérique où les simples d’esprit étaient considérés comme les envoyés de Dieu, de Manitou. On les respectait éminemment. Cette simplicité, cette naïveté peuvent être proches de certaines formes d’intelligence.

Je cite dans la pièce Saint Augustin qui dit « La foi précède, l’intelligence suit ». Je le comprends… mais j’aime bien quand l’intelligence précède, même si ça peut paraître prétentieux et si on peut avoir un doute sur l’intelligence systématique qui va toujours au-delà du doute. Il faut accepter qu’il y ait des cerveaux différents… surtout quand on voit qui le peuple américain a élu.

Votre pièce actuelle se nomme « La buvette, le tracteur et le curé ». A deux, on s’ennuie vite alors qu’une relation triangulaire explose souvent.
Effectivement, le chiffre trois fonctionne beaucoup et bien sur mes 70 pièces, même si j’ai écrit des dialogues d’échange à deux dans le style de Brisville avec « Le souper » mais ça fonctionne mieux sur un mode à trois, un peu comme le mari, la femme et l’amant. Même si le curé n’est l’amant de personne dans cette pièce !
 


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