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Move-On Magazine

Entretien avec DOMINIQUE PITOISET, après une représentation de La Résistible Ascension d’Arturo UI


Le 6 novembre 2016, à Bonlieu Scène Nationale Annecy

Une leçon de théâtre en toute modestie


| Publié le Jeudi 10 Novembre 2016 |

Dominique Pitoiset ©DR
Dominique Pitoiset ©DR
Dominique Pitoiset, vos mises en scène sont remarquables d’intelligence au sens où rien n’y est gratuit, tout est lié, relié au sens. Comment avez-vous appris la mise en scène ?
En réalité, mon parcours est un peu chaotique. J’ai d’abord étudié les arts plastiques, l’architecture, beaucoup plus l’espace. Ensuite je voulais passer le concours de l’école de Strasbourg . Je souhaitais entrer dans le département de scénographie mais je suis arrivé trop tard pour le concours et le directeur de l’école, Claude Petitpierre, un type formidable, m’a proposé de donner la réplique pour le concours d’acteur. Finalement j’ai été retenu et engagé dans l’équipe de Jean-Pierre Vincent. J’ai commencé à faire l’acteur un peu comme ça, mais j’étais plutôt à l’extérieur, à regarder, à étudier. Je savais qu’à Strasbourg il y avait le caveau des situationnistes. Guy Debord avait œuvré et sévi et le fait est que ce caveau se trouvait sous le resto U où nous allions. Quelqu’un m’a trouvé la clef et j’créé  un théâtre nocturne avec mes copains de l’école. J’ai fait mes premiers pas comme ça. J’avais plus envie de fabriquer des objets que d’être interprète. Jean-Pierre Vincent a vu l’un de mes travaux et m’a proposé d’être son assistant. Je suis parti avec lui à la Comédie Française, mais le Français ne me convenait pas, je ne m’y sentais pas bien, ce qui a été confirmé quand j’y suis retourné. Ce n’est pas l’idée que je me faisais du théâtre. J’ai été engagé au TNP, à la Comédie de Genève par Benno Besson et l’équipe de Planchon pour être assistant à leur venue en France. J’ai été assistant sur La Cerisaie à Genève et sur Le Prince de Hombourg au TNP. Je suis entré comme ça de plain pied dans l’école berlinoise post- brechtienne. Je suis ensuite allé tout seul à Berlin, faire mes classes. A suivi un séjour en Italie après que j’ai obtenu le prix de la Villa Medicis, du côté de Strehler et  Rangoni. En fait je me suis formé auprès de grands maîtres de la mise en scène, mais tout seul. C’est moi qui ai fait mes propres voyages.

Vous êtes une sorte d’autodidacte ?
Il n’y a pas d’école de mis en scène en France. Je le regrette. Il faudrait une grande école à l’image de  ce qu’est le BAT à Berlin.

C’est peut-être ce qui fait de vous un « passeur ». Vous allez travailler avec de jeunes étudiants de Lyon.
J’ai créé et dirigé trois écoles, deux en France et une en Italie, j’ai un peu d’expérience dans ce domaine et après mon départ de Bordeaux je ne voulais plus enseigner en France, je considérais que c’était peine perdue, que l’enseignement supérieur avait ravagé les enseignements professionnels…et puis j’ai rencontré Thierry Pariente qui est directeur de l’ENSATT (Ecole Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Spectacle, installée à Lyon depuis 97). On m’a proposé un beau projet, Le Songe de Shakespeare avec les acteurs et Le Songe de Britten avec les musiciens au Conservatoire. Un diptyque pour lequel je vais essayer de les aider.
   Je suis cependant assez pessimiste sur ce qu’on peut appeler l’école française. On s’est trompé d’aiguillage.

C'est-à-dire ?
Il faut privilégier les grands fondamentaux. Je me suis donné comme mission personnelle d’écrire un catalogue des écoles du jeu en Europe, de leurs spécificités, d’indiquer à quel mouvement esthétique elles étaient liées et quel était l’art de l’interprétation dans ces différentes écoles. C’est quantifiable et transmissible, sauf qu’on semble sciemment vouloir l’ignorer. C’est dommage parce que pour pouvoir maîtriser son instrument, trouver sa liberté et pouvoir se réinventer aujourd’hui, il faudrait, tout comme en musique, avoir une vraie maîtrise des styles de jeu. En France, nous sommes en retard. Il faut jouer en conscience. On ne joue pas Shakespeare comme on joue Molière, Koltès , les Italiens, de même qu’on ne joue pas Mozart comme du free jazz ou de la variétoche. Les interprètes ont besoin d’avoir une vraie caisse à outils, et elle existe. Si j’ai accepté l’invitation à Lyon, c’est par sympathie, des liens se sont créés et ma compagnie paie la taxe d’apprentissage à cette école. Je souhaite m’inscrire physiquement dans les géographies dans lesquelles je travaille.

Votre mise en scène d’Arturo Ui est limpide de réalisme cynique.
Oui, parce que le cartel, c’est aussi le Médef. Pour jouer ce théâtre, il faut être sincère dans l’instant et en même temps être manifeste. Etre dans une esthétique totalement immédiate, signifiante car le sens doit être balisé par des signes forts comme le fait que nous soyons dans une banque qui est à la fois une morgue et le siège d’une grande organisation internationale. Ce sont ces signes qui permettent de dégager les acteurs d’un théâtre de foire afin qu’ils soient dans une crédibilité télévisuelle. C’est un théâtre immédiat qui exige d’inventer l’endroit d’où on parle, de le définir.

Bien qu’on sente venir le final, on est surpris par sa force. Tout le public ressent cette force.
Le texte de Brecht ,à la fin, me semblait plus faible que le silence. J’ai décidé de travailler avec notre réalité. C’est une mise en scène de circonstance. Je ne souhaite pas voir arriver au pouvoir les marchands de peur, quels qu’ils soient.


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