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Move-On Magazine

"Le dernier Atlas", BD, chaîne de montagnes, et morceau de mythologie en train de s’élaborer



| Publié le Vendredi 12 Avril 2019 |

"Le dernier Atlas" Fabien Vehlmann présentait son dernier livre à BD Fugue Annecy le 11 avril 2019 ©Paul Rassat
"Le dernier Atlas" Fabien Vehlmann présentait son dernier livre à BD Fugue Annecy le 11 avril 2019 ©Paul Rassat
C’est la caractéristique d’un « emmerdeur » de se demander chaque fois ce qui se serait passé si.
Tout à fait. A partir d’une histoire qu’on croit connaître, on fait un pas de côté, ce qui s’appelle une uchronie , pour déceler les invariants. Parmi ceux-ci, le pétrole aurait été découvert, mais la décolonisation se serait produite aussi. Même si De Gaulle avait octroyé plus de droits aux Algériens d’origine, le mouvement vers l’indépendance était lancé. Mais les populations étaient tellement entremêlées que ce qui s’est produit relève de la guerre civile, fratricide. Les Algériens venus aider à reconstruire la France dans l’après guerre mondiale ont été perçus comme des ennemis.
   Cette guerre civile qui n’a jamais dit son nom a laissé des traces dans les psychés française et algérienne.

Et vous vous amusez à produire quelques pages d’une uchronie très sérieuse et factuelle à la fin du bouquin.
On s’est éclatés.

On fond, être écrivain, artiste, c’est se dire « Et si… » On change un paramètre et on voit ce qui se passe.
Intellectuellement c’est un jeu extrêmement productif qui , pour moi, avait aussi l’intérêt de me détacher de l’actualité trop brûlante de la guerre d’Algérie parce que, même aujourd’hui beaucoup de gens sont encore à vif sur ce sujet et puis parce que mon père ayant fait cette guerre, il y a un non dit familial que l’uchronie permet d’évoquer. Mon père n’en parlait pas, sans doute parce que, pour tous les appelés, ça a été un trauma. Certains militaires qui ont été là-bas l’assument complètement…

Et font de la politique.
Ou finissent de faire de la politique, plus ou moins bien. Les appelés ne parlaient pas de cette guerre qui n’en portait pas le nom pour des raisons personnelles mais aussi parce que personne n’avait envie d’en entendre parler.

On cherche toujours à exporter ses conflits. Pendant la première guerre mondiale, les tranchées semblent ne pas avoir empêché le divertissement à Paris, par exemple, et avec l’Algérie et la colonisation en général, la France exportait ses problèmes.
Qui lui sont revenus dans la figure. De même qu’on veut exporter nos déchets en envoyant le Clémenceau se faire démanteler en Inde. On essaye toujours de délocaliser les emmerdes, comme les essais nucléaires en Algérie. De Gaulle n’allait pas faire ça en Picardie !
Mais si on parle à l’échelle du monde et plus dans une relation limitée France/Algérie, on voit que les déchets ne se délocalisent pas parce que tout nous retombe dessus avec le dérèglement climatique. On se rend compte qu’il n’y a pas de manière de régler les problèmes sans se les fader soi-même.

En termes d’écologie, beaucoup pensent qu’il faut sauver la planète, il faut d’abord sauver les gens.
La planète, elle, va s’en sortir au bout de quelques millions d’années.

Tu es écolo ?
Ecolo, pas dépressif mais inquiet. Ce n’est pas parce que je suis relativement pessimiste que je suis inactif. La lucidité permet d’agir, comme le font aussi des optimistes, le tout est d’être dans l’action. Après avoir fait le constat que nous avons des heurts à affronter, même s’ils ne sont pas encore directement chez nous, il faut se retrousser les manches. Et pour continuer avec des images, je préfère à la métaphore du colibri un peu tout seul dans son coin celle de l’effet papillon et de l’action dont l’impact dépasse largement la personne.

Quand on agit comme tu l’exprimes, on n’est jamais seul.
Ce n’est pas pour rien qu’une de mes séries est intitulée « Seuls », avec un s.

Les enfants que tu y mets en scène sont assez affreux.
Ce sont des êtres humains avec tout ce que ça comporte de cruauté.

Plus ou moins des pervers polymorphes  pour caricaturer Freud.
Exactement. Si l’on veut être honnête en parlant du monde, il faut aussi montrer ses côtés dégueulasses de manière plus ou moins dure suivant que l’on s’adresse à des adultes ou à des enfants. Mais « Le dernier Atlas », finalement est lu aussi par des jeunes.

On revient aux différents niveaux de lecture que permet l’évocation de la violence.
Ceux qui connaissent les thèmes abordés voient de quoi il retourne et les plus jeunes sont intéressés par l’action, par l’intrigue. Les adultes peuvent y voir une proposition de jeu qui consiste à dire « Voilà comment on imagine que ça se serait passé, mais vous qu’en pensez-vous ? » Il s’agit de stimuler l’esprit critique à partir d’une fable politico-écologique.

Ce qui nous mène au livre politico-philosophique qu’est « Les derniers jours d’un immortel ». Pour moi un chef d’œuvre qui permet presque de réviser son bac philo en s’amusant. Tu y évoques l’humour préhistorique. Tu as une idée de ce que c’était ?
Pour moi les débuts de l’humanité ont été accompagnés d’un déploiement de rires parce que le rire est l’une des conditions sine qua non de la survie. On évoque souvent la pyramide de maslow avec l’idée que la survie dépend de la satisfaction des besoins physiologiques. On meurt effectivement assez vite si l’on n’a ni à manger ni à boire, mais sans relations sociales on meurt aussi. Je considère que le rire est l’un des éléments fondateurs de la civilisation, tout autant que la chasse ou la religion…

Qui peut parfois être très amusante.
Oui, ce n’est pas si fréquent, mais c’est possible (rires). Imaginer qu’on puisse réentendre des rires imprimés dans les murs des cavernes m’enchante. J’ai fait une série intitulée « IAN » à base de données scientifiques très exactes, dans laquelle je me permettais quand même une petite licence poétique, mais j’ai arrêté parce que je me suis rendu compte qu’on est perpétuellement rattrapé par la science.
C’est pourquoi je pense qu’un auteur doit vraiment utiliser la licence poétique en se disant que , même si ce n’est pas crédible, il a envie que ça existe ou bien ça finirait par exister si on avait la capacité de le réaliser.
« Les derniers jours d’un immortel » montrent des gens qui ont une quinzaine de clones permettant de vivre quinze vies en une ; c’est, poussé à l’extrême, ce que permet internet, un portable. On voit que le fantasme de vivre partout, plusieurs vies à la fois sera réalisable dans le futur.
 
(La suite de l'interview en cliquant sur le volet suivant)

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